CAMPAGNE HIVERNALE 2009
ET SES CONSEQUENCES SUR LES ACTIVITES TRADITIONNELLES DANS LA ZONE AÏR
1 - INTRODUCTION
La situation pluviométrique 2009 dans la région
d’Agadez est caractérisée à fin Août
par l’inexistence des précipitations dans la partie Nord
et Est de l’AÏR, leur irrégularité et leur mauvaise
répartition dans le reste de la zone. En effet à l’heure
actuelle, certains terrains de parcours situés à l’Est
et au Nord du massif de l’AÏR, n’ont pas encore enregistré
une goutte de pluie. Les principales vallées n’ont pratiquement
pas coulé. Le kori de Timia (Anou Makaren) par exemple, a coulé
une seule fois.
La saison pluviométrique n’est pas totalement terminée
: elle est à 90% de sa durée saisonnière normale.
Mais au vu de la position du F.I.T (Front Inter Tropical) qui se maintient
sur l’axe Iférouane-Bilma donc relativement bas, le niveau
des précipitations actuelles (60 mm environ pour une moyenne annuelle
de 160 mm) et les prévisions météorologiques défavorables,
la situation future n’augure d’aucune perspective prometteuse.
Une inquiétude grandissante est perceptible auprès des
paysans dans la zone, surtout auprès des éleveurs (bergères,
caravaniers…..). On note déjà des déplacements
précoces importants des éleveurs vers des zones ayant enregistré
quelques précipitations. Au Sud du pays, dans la zone sédentaire
donc agricole, la pluviométrie est irrégulière et
a démarré tardivement. La campagne agricole 2009 risque
d’être mauvaise. Or le sud étant le grenier de l’AÏR
(Damergou), il est à craindre une pénurie de mil, céréale
la plus consommée.
Les conséquences de cette situation sur les activités traditionnelles
principales dans la zone AÏR seront graves pour le maraîchage,
l'élevage et le trafic caravanier.
Le maraîchage
• Le manque de rechargement des nappes phréatiques
pouvant entraîner l’abandon partiel ou total de certains jardins.
• La réduction ou la perte de l’apport apporté
par la production maraîchère à la sécurité
alimentaire en particulier et à l’économie locale
en général.
• Le désœuvrement et l’exode des maraîchers
ayant abandonné leurs jardins par manque d’eau.
L'élevage
• La déstabilisation du système pastoral traditionnel
pouvant entraîner des distorsions graves dans la gestion des espaces
pastoraux du fait de la rareté et de la mauvaise répartition
du pâturage et aussi du tarissement de certains puits pastoraux.
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• La concentration des éleveurs dans certaines zones, et
donc la surcharge des espaces pastoraux correspondants, engendrant de
fait le surpâturage et la dégradation précoce du couvert
végétal.
• La perte du capital cheptel pour certaines bergères et
la résurgence de certaines épizooties inhérentes
à cette situation.
• La baisse drastique de la production des sous produits de l’élevage
(fromages, laits….), privant les bergères d’une part
importante de leur alimentation, mais aussi réduisant le pouvoir
d’achat des ménages.
Le trafic caravanier
• La difficulté ou l’impossibilité pour les
caravaniers de réaliser la caravane de sel vers Bilma .
• Le mauvais embonpoint des chameaux par manque d’herbe fraîche.
• La rareté ou le manque de paille pour l’alimentation
des chameaux en vue de la traversée du désert du Ténéré.
• La non recharge des points d’eau de ravitaillement des abords
du Ténéré permettant de constituer les réserves
d’eau pour la traversée du Ténéré.
• La perturbation du cycle de cette activité principale séculaire,
privant la zone d’un moyen important de ravitaillement en produits
de première nécessité et complique sa situation alimentaire.
D’une manière générale toutes ces activités
s’exercent de façon complémentaire par toutes les
familles de la zone. Une de leurs caractéristiques communes est
qu’elles sont toutes tributaires de la pluviométrie. Une
mauvaise saison des pluies les affecte toutes, mais à des degrés
divers et dépendant de la situation de l’année précédente.
Dépendantes les unes des autres, ces activités sont actuellement
les seules exercées par la population de la zone. De plus, en raison
de l’insécurité de la zone depuis février 2007
et ses conséquences négatives, l’artisanat et le tourisme,
qui étaient en pleine expansion, sont pratiquement inexistants
à ce jour (aucun touriste depuis fin 2007). Une partie des artisans
et des ex employés du tourisme se sont reconvertis en maraîchers
et en éleveurs. D’autres sont partis en exode en ville ou
dans les pays voisins du Nord
La vulnérabilité des activités traditionnelles vis
à vis des aléas climatiques et leur poids dans l’économie
locale nous recommandent donc de les prioriser dans nos actions futures
pour une meilleure efficacité, l’objectif étant d’atténuer
les effets néfastes sur la population. L’idéal serait
certes d’agir immédiatement dans tous les domaines, mais
ceci demande des moyens importants et nécessite un climat détendu.
Or, l’insécurité demeure présente avec des
actes intempestifs de banditisme, et l’état de « mise
en garde » toujours en vigueur :
• Dans la situation actuelle, les caravaniers sont les plus vulnérables.
Ils se préparent pour le départ vers Bilma en tenant compte
du cycle de leur activité, mais ne sont pas dans les conditions
normales de faire la traversée, au vu du grand déficit pluviométrique
enregistré.
• Les éleveurs et surtout les bergères, sont tout
aussi éprouvés, mais arrivent actuellement à se maintenir
en se déplaçant vers les zones arrosées et couvertes
d’herbages. Les actions en leur direction sont à prévoir
pour la fin de l’année et le premier semestre 2010.
• Quant aux maraîchers, tout dépendra de l’état
des nappes à la fin de la saison. En effet, certaines nappes sont
alimentées par des sources lointaines et la recharge survient parfois
6 mois après la saison des pluies.
En tout état de cause, toutes les actions seront identifiées
et choisies par et avec les bénéficiaires conformément
à notre philosophie d’intervention. Cependant, il ressort
de ce qui précède l’urgence d’agir en premier
lieu et sans attendre en faveur des caravaniers qui feront bientôt
les caravanes de sel.
2 - BESOINS ET ESTIMATION DE L’APPUI AUX CARAVANIERS
Le trafic caravanier était jadis la 2ème activité
économique traditionnelle de l’AÏR, après l’élevage.
Il constituait le socle des échanges socio-économiques transsahariens.
Il est principalement pratiqué par les hommes. Aujourd’hui,
avec le progrès surtout dans le domaine du transport (concurrence
du véhicule), la sédentarisation des nomades sur fond du
développement du maraîchage, les difficultés de passage
d’une frontière à une autre, l’exode des jeunes
suite à des sécheresses et autres aléas, l’émergence
des activités nouvelles (mines, tourismes, projets….), cette
activité très pénible et peu rentable décroît
inexorablement.
Malgré toutes ces difficultés, cette activité résiste
et se maintient tant bien que mal, principalement dans le massif de l’AÏR.
Elle a en fait un fort caractère culturel et occupe des milliers
de personnes, irréductibles d’un certain âge (40 ans
et plus) ainsi qu’une frange importante de jeunes de moins 18 ans.
Nonobstant les écrits prédisant sa disparition en fin 20ème
siècle, force est de constater que le trafic caravanier perdure,
s’adapte et se développe. Chaque année des centaines
de caravaniers avec des milliers de chameaux quittent l’AÏR
pour BILMA afin de troquer les produits agropastoraux contre du sel et
des dattes, de les transporter, de les vendre et d’acheter du mil
et des étoffes au Sud ( Damergou, Zinder, Tessaoua, Nigeria..),
pour couvrir les besoins annuels de leurs familles. La durée totale
de l’absence est de 6 mois environ. Cette activité demeure
encore actuellement l’une des principales activités économiques
de la région.
De part sa spécificité, le trafic caravanier n’a
fait l’objet d’aucun projet de développement de la
part des organismes nationaux et internationaux intervenant dans la zone,
durant ces dernières décennies. Cette activité est
restée donc intacte et vierge et se pratique de nos jours comme
depuis la nuit des temps.
Consciente de cet état de fait et dans le but de promouvoir toutes
les activités y compris traditionnelles dans la commune de Timia,
l’Association « Les Amis de Timia » intervenant dans
la zone depuis dix ans, a toujours appuyé les caravaniers en leur
consacrant annuellement une enveloppe de1 500 000 francs CFA soit 2 300
€. Ils ont également fait l’objet de plusieurs aides
en équipements et médicaments.
Or depuis 2 ans, suite à la situation d’insécurité
qui prévaut dans la région et l’état de «mise
en garde» institué, l’appui apporté par les
Amis de Timia aux caravaniers a été réorienté,
l’objectif étant d’atténuer les conséquences
négatives de cette situation notamment les difficultés de
circulation et de ravitaillement des villages isolés en vivres
de première nécessité. Il s’agissait ainsi
d’octroyer aux caravaniers une somme équivalente à
2 chargements de mil : Un premier chargement est livré au village
à l’Association, pour le compte des actions sociales collectives,
et le deuxième sert au remboursement des frais de transport du
caravanier. Ce système ne perturbe pas les activités traditionnelles.
Il lui vient au contraire en appui.
En février 2009, lors d’une réunion à Tessaoua,
avec les représentants de 182 chefs caravaniers ayant fait le déplacement
au Sud, il a été décidé de maintenir l’appui
pour la caravane du sel (appui de 1 500 000 FCFA soit 2 300 € avant
le départ sur BILMA) par priorité à l’appui
à la caravane du mil, à défaut de pouvoir financer
les deux actions. A l’issue de la réunion, 121 caravaniers
ont bénéficié de l’appui « sel »
(5 000 FCFA par caravanier soit 8 €) et 61 ont bénéficié
de l’appui « mil » (30 000 FCFA par caravanier soit
45 €), le tout pour une somme totale de 2 730 000 FCFA y compris
les frais de mise en œuvre et de gardiennage de 4 mois du centre
de Tessaoua (30 000 FCFA = 45 €) pour 182 caravaniers. Pour mémoire,
l’opération 2007/2008 a coûté 2 125 000 FCFA
= 3 240 € pour 57 caravaniers (35 000 FCFA = 53 € par caravanier)
y compris les frais et n’a concerné que l’opération
« mil ».
Aujourd’hui, en raison de la situation pluviométrique déficitaire
et de l’approche de la période des caravanes du sel, il est
important d’agir vite en vue de maintenir le cycle des caravanes
dans le but de soutenir l’économie locale. En effet, il est
vital pour la zone AÏR que la caravane du sel ait lieu, activité
importante pour le ravitaillement en vivres de la région. Pour
cela, les deux actions « Sel » et « Mil » doivent
être maintenues et renforcées. La période propice
pour agir est comprise entre fin septembre et début octobre.
Il ressort des discussions et débats tenus avec les caravaniers
à Timia par les responsables locaux de l’Association que
la somme habituellement octroyée (5 000 FCFA = 8 €) est à
augmenter au moins de 50% (7 500 FCFA = 12 €). Seuls en bénéficieront
les caravaniers devant se rendre effectivement à Bilma et ceux
ne pouvant pas être concernés par l’opération
« mil ». Ainsi, les estimations suivantes ont été
établies :
Opération « sel »
• nombre estimé de caravaniers en activité : 220 environ
• période indiquée de l’opération : fin
Septembre à début Octobre
• objet de l’opération : mettre à disposition
des chefs caravaniers une somme de 7 500 FCFA = 12 € leur permettant
d’assurer en partie leurs provisions pour se rendre à Bilma
• participation des bénéficiaires : 30% de la somme
octroyée
• coût de l’opération : 7 500 FCFA X 220 = 1
650 000 FCFA = 2 515 €
Opération « mil »
Au vu du succès des deux dernières opérations réalisées,
il a été décidé de continuer le même
type d’action pour les caravaniers qui n’en non pas encore
bénéficié.
• nombre de bénéficiaires : 50 chefs caravaniers
• période indiquée de l’opération : Janvier,
Février
• objet de l’opération : octroyer à chaque caravanier
une somme suffisante permettant acheter 2 chargements de mil (300 KG)
de chameau. Un chargement est cédé au caravanier comme frais
de transport et le second est livré au village pour les actions
sociales de l’Association.
• participation des bénéficiaires : équivalent
de 50% de la somme octroyée en mil
• coût de l’opération : 42 000 FCFA x 50 = 2
100 000 FCFA = 3 205 €
Coût Total des opérations : 3 750 000 FCFA = 5 720
€
Pour être efficaces et efficientes, les deux actions sont à
réaliser à des périodes précises telles que
spécifiées, en cohérence avec le cycle du trafic
caravanier. Le respect de ce cycle garantit l’opportunité
et la faisabilité de l’intervention.
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